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Zoos Humains : Mémoire Coloniale


programme et manifestations : Cycle de conférences et forum d'octobre à décembre 2001 à Paris, organisé par l'ACHAC, le GDR 2322 CNRS et l'IMA, avec le concours du Monde diplomatique, de la revue Hermès et de la revue Africultures

Les zoos humains, symboles incroyables de l'époque coloniale et du passage du XIXe au XXe siècle, ont été totalement refoulés de notre histoire et de la mémoire collective. Ils ont pourtant existé, et c'est par dizaines de millions que des Français, des Européens ou des Américains sont venus découvrir, pour la première fois, le "sauvage"... dans des zoos ou dans des exhibitions ethnographiques et coloniales.Revenir sur cette page essentielle de notre histoire récente, tel est l'enjeu de ZOOS HUMAINS - MÉMOIRE COLONIALE.

Ce programme, initié en juin dernier par un colloque international à Marseille, s'inscrit dans une actualité riche sur le thème et se prolonge sur deux ans. Du débat sur la torture en Algérie à la prise de conscience de plus en plus vive sur le passé colonial de la France (à l'image du numéro spécial de Manière de Voir (n°58 de juillet 2001) Polémique sur l'histoire coloniale ou de celui de la revue L'Histoire (n°11 d¹avril 2001) Le temps des colonies, les enjeux d'un tel débat sont multiples, à l'image de ceux soulevés lors de la Conférence sur le racisme de Durban en Afrique du Sud. La publication dans Les Cahiers français d'un numéro spécial sur la mémoire en France (Les pièges de la mémoire coloniale, septembre 2001) ou l'ouverture de l'exposition Kannibals et Vahinés au Musée d’Arts Africains et Océaniens, au mois d'octobre prochain, souligne également que cette réflexion s'attache aux modes d'expression les plus divers. Enfin, à la rentrée, la sortie de nombreux ouvrages comme celui de Sylvie Thénault sur la guerre d'Algérie et la justice, celui d'Annie Rey-Goldzeiguer sur l'origine de ce conflit ou l'ouvrage collectif Le Paris noir (aux éditions Hazan) comme la programmation pour le mois de novembre d’un colloque à Londres sur les images d'empire, sont les signes d'une prise de conscience nouvelle et européenne.

Autant d'axes et de symboles qui annoncent un retour sur ce « passé qui ne passe pas ». Le programme ZOOS HUMAINS - MÉMOIRE COLONIALE apporte un autre regard sur l'origine de ce rapport à l'Autre et raconte comment les métropoles coloniales ont inventé le "sauvage", la "race" et la domination afin de mieux coloniser le monde.

Comment l'Occident a colonisé l'image de l'Autre ?

Ces zoos humains, expositions ethnologiques ou villages nègres restent des sujets complexes à aborder pour des pays qui mettent en exergue l'égalité de tous les êtres humains, et en tout premier lieu, la France républicaine, « pays des droits de l'Homme ». De fait, ces zoos, où des individus exotiques mêlés à des bêtes sauvages étaient montrés en spectacle derrière des grilles ou des enclos à un public avide de distraction, constituent la preuve évidente du décalage entre discours et pratique au temps de l'édification des empires coloniaux.

Déjà, à la fin du XIXe siècle, quelques récits très minoritaires parlent d'effroi devant de tels spectacles mais l'attitude dominante du public est révélatrice : nombre de visiteurs jettent nourriture ou babioles aux groupes exposés, commentent les physionomies en les comparant aux primates ou rient franchement à la vision d¹une Africaine malade et tremblante devant sa case... tel fut la réalité de ces zoos humains au tournant du siècle.

Ces exhibitions de l¹exotique (futur "indigène") constituent, pendant près de 60 ans, le passage progressif en Occident d'un racisme "scientifique" vers un racisme colonial et "populaire" qui touchera des millions de "spectateurs" de Paris à Hambourg, de Londres à New York, de Moscou à Barcelone... Comment cela a-t-il été possible ? Les Européens sont-ils capables de prendre la mesure de ce que révèlent les zoos humains de leur culture, leur mentalité, leur inconscient collectif ? Questions essentielles, alors qu'un Musée des "arts premiers" ouvre ses portes à Paris.

Peut-on aujourd'hui considérer ce temps comme révolu ?

Sans doute pas, puisque la reconstitution d’un village massaï vient d'ouvrir ses portes en Belgique et qu'en Bretagne un village africain fut l'attraction majeure d'un Safari Parc dans les années 1990. Quelle filiation avec les images actuelles de l¹Afrique ou des banlieues peuplées de « sauvageons » peut-on voir avec les milliers d¹images issues de ses spectacles et largement diffusées pendant un siècle ? Notre regard, avide d¹exotisme, est-il très différent devant la TV réalité et les divers Loft Story qui semblent consacrer une nouvelle ère de l'image en Occident ? Voyeurisme, sensationnalisme, rapport à la "différence" ou à la "normalité", chaque siècle semble avoir les zoos humains qu¹il mérite !

Pourquoi les zoos humains ?

Les zoos humains ne révèlent évidemment rien sur les "populations exotiques" ou sur les populations colonisées. En revanche, ils sont un extraordinaire instrument d'analyse des mentalités de l'Occident de la fin du XIXe siècle jusqu'aux années 30. Car ces zoos, expositions et jardins avaient pour vocation de montrer le rare, le curieux, l'étrange, toutes les expressions du non-habituel et du différent, et non de provoquer une rencontre entre individus ou cultures. Dans cette "animalisation" des peuples "exotiques" par l'Occident, la mise en scène de transgressions des valeurs et des normes de ce qui constitue, pour l'Europe, la civilisation, est un élément moteur. Leur nature d'homme achevé est niée, ils sont donc colonisables, il faut les apprivoiser, les dresser, pour les conduire, peut-être à l'état d'homme civilisé. Ces expositions sont l’illustration du discours légitimant l'action coloniale de l'Occident.

Le plus frappant, dans cette brutale "naturalisation" de l'Autre, est la réaction des élites européennes : fort peu de journalistes, d'hommes politiques ou de savants s'émeuvent des conditions sanitaires et de parcage - souvent catastrophiques - des "indigènes" ; sans même parler des nombreux décès de personnes peu habituées au climat (comme lors de la présence des Indiens kaliña, en 1892 à Paris). C'est à ce niveau que l'on mesure la pénétration profonde d'un racisme populaire en Occident et que l'on comprend comment, en à peine 30 ans, la grande majorité des Européens a accepté, validé et soutenu l'entreprise coloniale. Dès lors leur devenir paraît tout tracé, puisqu'ils n'étaient que des "sauvages" : l'Occident se devait de les amener à la lumière, de les sortir du zoo... où il les avait lui-même fait entrer !

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Revenir sur cette mémoire oubliée : deux manifestations pour le quatrième trimestre 2001

Un cycle de conférences à l'Institut du Monde Arabe (tous les mardis soir à partir du 30 octobre 2001) reviendra sur la genèse et le développement de ce phénomène sur le temps long (de l'émergence d'un discours racial en Occident au regard actuel sur l'Autre).

Un Forum grand public, le samedi 1er décembre 2001, en présence d'une quinzaine d'invités (universitaires, journalistes, hommes politiques, intellectuels...) cherchera à montrer les héritages actuels d'une telle mise en scène.

Ce forum sera animé par Pascal Blanchard ( ACHAC), Daniel Mermet (France Inter), François Zabbal (IMA) et Alain Gresh (Le Monde diplomatique).

LES CONFERENCES DE L'IMA

du 30 octobre 2001 au 18 décembre 2001 tous les mardis à 18h30 (entrée gratuite)
Institut du monde arabe / 1, rue des Fossés St-Bernard 75005 Paris, tel : 01 40 51 38 59 M° Jussieu

Ce cycle de conférences, destiné au plus large public (200 places par conférence), souhaite aborder la question de la mémoire de la colonisation en partant des zoos humains et du discours "racial" émergeant au XIXe siècle pour aboutir au contexte actuel de notre relation à l'Autre (racisme, immigration-intégration, banlieues, déficit de mémoire lié à la colonisation...).

Dans ce cadre, nous proposons avec l'Institut du Monde Arabe et Le Monde Diplomatique, tous les mardis soir du 30 octobre au 18 décembre 2001, à l'IMA (de 18h30 à 20h30), des conférences avec les meilleurs spécialistes de la question. Ouvertes au public dans le mesure des places disponibles (entrées gratuites), celles-ci suivront sur le temps long la construction de notre relation "coloniale" à l'Autre.

Les conférenciers, comme les invités, seront d'univers très différents (journalistes, universitaires, chercheurs) afin d'éclairer les enjeux d'un tel débat. Chaque conférence de 30/40 minutes, sera ensuite mise en perspective par les réactions de (ou des) invité(s) avant de donner le parole au public pour le débat animé par François Zabbal.

Programme des conférences :

30 octobre 2001
Stéréotypes coloniaux et racisme : le temps des colonies
conférencier : Alain Ruscio

invités : Roger Boulay et Claude Blanckaert

13 novembre 2001
Les grandes expositions coloniales : le temps de l'apogée colonial

conférencier : Herman Lebovics
invité : Catherine Coquery-Vidrovitch

20 novembre 2001
Anthropologues et sauvages : le temps des hiérarchies

conférencier : Gilles Böetsch
invité : Albert Memmi

27 novembre 2001
Propagande et imaginaire colonial : le temps des imaginaires

conférencier : Sandrine Lemaire
invité : Pierre Vallaud

4 décembre 2001
Colonisation et immigration : le transfert de mémoire

conférencier : Benjamin Stora
invité : Eric Deroo

11 décembre 2001
Enjeux contemporains de la mémoire coloniale : le temps des héritages

conférencier : Pascal Blanchard
invités : Alain Gresh et Nicolas Bancel

18 décembre 2001
De l'autre côté du miroir : le temps des bilans

conférencier : Mohamed Harbi
invité : Gilles Manceron

Contact : memoire.coloniale@achac.com

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LE FORUM-DÉBAT DE L'IMA


samedi 1er décembre 2001 de 9h30 à 13h45 à l'Institut du Monde Arabe
(entrée gratuite)

Institut du monde arabe / Grand auditorium
1, rue des Fossés St-Bernard 75005 Paris M° Jussieu

"des zoos humains aux banlieues" LES ENJEUX DE LA MÉMOIRE COLONIALE

A l'Institut du Monde Arabe, dans le cadre d’un cycle de conférences sur un trimestre et dans le prolongement du colloque international qui s'est tenu à Marseille en juin 2001, nous proposons au public de réfléchir aux enjeux contemporains liés à la mémoire coloniale.

Les objectifs de cette rencontre sont à partir des zoos humains de s'interroger sur : les questions actuelles liées à l'immigration, aux imaginaires sur les banlieues, à la construction de l'altérité corporelle ; la compréhension des blocages sur la question coloniale en Occident, tant au niveau des élites politiques que des médias ; le champ de réflexion sur l'intégration et la relation complexe à l'autre « ex-colonisé ». Enfin, notre volonté est de mesurer le poids de ce passé dans un pays, une République et un Etat qui n'a toujours pas assumé son histoire coloniale.

Ce forum sera animé par Pascal Blanchard (président de l¹ACHAC), Daniel Mermet (de France Inter), François Zabbal (directeur de la revue Quantara, Ima) et Alain Gresh (rédacteur en chef du Monde diplomatique) et rassemblera autour d'une table ronde une douzaine de spécialistes de la question (Nicolas Bancel, Sandrine Lemaire, Gilles Manceron, Gilles Böetsch, Dominique Wolton, Alain Ruscio, François Gèze...), mais aussi des responsables politiques ou institutionnels. Enfin, sera présente dans la salle, une grande partie des chercheurs et universitaires (d'une douzaine de pays) contribuant actuellement au programme Zoos Humains.

Cette journée sera ouverte par un film-synthèse (de 7 minutes) tourné à Marseille en juin 2001, rappel de la réflexion scientifique sur ces questions. Chaque intervenant de la table ronde sera invité à réagir, à contextualiser et à mettre en perspective la problématique, avant de donner la parole au public. A l'issue des conclusions, proposées par les trois animateurs, sera diffusée une dizaine de films inédits présentés par Eric Deroo :

Le temps des exhibitions "zoos humains" avec 6 films reportages / 10 mn
Le temps de la colonisation "exposition et propagande"avec 3 films de propagande / 12 mn
Le temps de l'immigration "intégration et conflits" avec 1 film de fiction

Informations IMA :
Institut du Monde Arabe
(conférences) / M° Jussieu
1, rue des Fossés St-Bernard
75005 Paris
tel : 01 40 51 38 59
Contact : memoire.coloniale@achac.com

 

LES ORGANISATEURS


ACHAC
Association Connaissance de l'Histoire de l'Afrique Contemporaine
75, Avenue Gambetta
75 020 PARIS France
Tél : 01 44 62 20 30
Fax : 01 44 62 20 31
memoire.coloniale@achac.com

GDR 2322 (CNRS)

Anthropologie des représentations du corps
Faculté de Médecine, Secteur centre
27 bld Jean Moulin
13385 Marseille Cedex 5
Tel : 04.91.32.45.79
Fax : 04.91.32.45.85
gdrcorps@hotmail.com

Comité d'organisation : Nicolas Bancel, Pascal Blanchard, Gilles Boëtsch, Eric Deroo et Sandrine Lemaire


Si vous souhaitez un dossier de presse complet ,
veuillez vous adresser à notre service de presse :

Tél : 01 44 62 20 30 / Fax : 01 44 62 20 31
memoire.coloniale@achac.com

 

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